Classifier les médias sociaux : une étape indispensable pour mieux les utiliser

Les médias sociaux impressionnent par leur puissance. Les chiffres d’audience de ces médias croissent de façon exponentielle. Facebook regroupe plus d’un milliard d’utilisateurs actifs dans le monde. Flickr héberge plus de 6 milliards de photos. Près de 200 millions de professionnels utilisent LinkedIn qui enregistre deux nouveaux membres toutes les secondes.

Ancêtre de la télévision sociale

Ancêtre de la télévision sociale

Parallèlement, les descriptions des stratégies gagnantes sur ce nouveau canal, les créations d’entreprises fondées sur l’analyse de données exponentielles, l’apparition d’agences spécialisées dans la gestion des marques sociales ou l’émergence de nouveaux métiers comme celui de community manager sont une preuve quotidienne de l’intérêt des marketeurs pour les médias sociaux. Pourtant, le sentiment général est qu’il existe une véritable confusion dans la gestion et l’utilisation de ces réseaux. Quelles sont les bonnes pratiques ? Comment mesurer leur ROI ? Quels impacts réels ces réseaux ont-ils sur l’image de la marque ou sur les ventes ?

Face aux interrogations des marques, deux chercheurs, Thomas Stenger du laboratoire CEREGE de l’IAE de Poitiers et Alexandre Coutant du laboratoire ELLIADD de l’Université de Franche Comté proposent une démarche originale d’étude. Collaborant avec l’Institut des Sciences de la Communication du CNRS, ils ont participé à deux projets de recherche1 menés en collaboration avec le groupe la Poste. Ces chercheurs sont partis d’un constat simple : tout le monde parle des médias sociaux mais on se révèle incapable de les classifier. Ce manque de clarification aboutit à des erreurs stratégiques et opérationnelles dues à une méconnaissance générale de ce que sont les médias sociaux.

Les six caractéristiques des médias sociaux

Afin de mieux comprendre les médias sociaux, Thomas Stenger et Alexandre Coutant ont réalisé un véritable travail de terrain reposant sur une approche ethnographique et sociotechnique menée durant trois ans. Cette recherche a combiné observations participantes, entretiens individuels, analyse des profils utilisateurs, etc.  L’objectif de cette recherche était de proposer une classification très opérationnelle des médias sociaux existants. Six caractéristiques des médias sociaux ont permis de servir de base à la réflexion.

  1. Les médias sociaux reposent sur l’UGC (contenu généré par l’utilisateur).
  2. Ils permettent à n’importe quel internaute de participer avec des outils et applications simples d’usage.
  3. Ils sont majoritairement gratuits mais impliquent une contrepartie comme le traçage, le profilage et l’exploitation des données des utilisateurs.
  4. Ils proposent un contenu qui évolue en permanence selon une logique de flux.
  5. Ils sont le fruit de la rencontre de l’usage, de la technologie, des stratégies économiques, de leur évolution.
  6. Ils regroupent des pratiques et des normes sociales très variées.

Quelles classifications ? les écueils à éviter, les pistes à privilégier

Les classifications proposées que nous avons tous eu l’occasion de consulter sur des blogs ou lors de présentations professionnelles souffrent toutes d’un grave écueil. Elles s’intéressent majoritairement à ce pour quoi les médias sociaux ont été conçus. Cette approche est une approche dite fonctionnaliste. Par ailleurs, on distingue souvent un usage unique par média. Or, les consommateurs s’approprient les médias sociaux, multiplient les usages comme l’expression narcissique de soi, les regroupements affinitaires ou la promotion professionnelle. Des approches plus intéressantes comme celle de Dominique Cardon (2008) ou celle de Kaplan et Haenlein (2010)2 ont le mérite de faire avancer considérablement les essais de classification des médias sociaux même si elles comportent un certain nombre de limites.

L'amitié avant les réseaux

L’amitié avant les réseaux

La cartographie proposée par Thomas Stenger et Alexandre Coutant repose sur deux axes : l’axe de la participation et l’axe de la visibilité. Le premier axe permet d’établir une distinction claire entre réseaux socionumériques et communautés en ligne, deux médias sociaux souvent improprement amalgamés sous le terme fourre-tout de « réseau communautaire ». Le deuxième axe met en évidence la nature et la finalité des données publiées et rendues visibles. Certaines données correspondent à des données personnelles fondées sur l’expérience des individus, ses préférences, ses goûts…D’autres correspondent à une logique de publication de contenu tiers comme les vidéos virales.

La suite de l’article présente en détail la cartographie élaborée. Elle détaille les implications et les recommandations pour le marketing. Elle met en exergue les difficultés auxquelles le marketing peut être confronté dans son utilisation des médias sociaux (complexification du ciblage notamment) mais également les apports des médias sociaux à un marketing plus collaboratif et plus en veille sur son marché. Nous vous laissons la découvrir grâce au lien ci-dessous.

(1)   Cette étude a été menée avec le groupe « La Poste » grâce à deux projets de recherche : le projet « réseau socionumérique et consommation » financé par la Mission Recherche et la Direction de l’innovation et des services (2008-2009) et le projet « Identic : identité numérique certifiée », financé par le secrétariat d’Etat chargé de la prospective et de l’économie numérique (2009-2011).

Référence : Thomas Stenger et Alexandre Coutant (2013), Médias sociaux : clarification et cartographie . Pour une approche sociotechnique, Décisions Marketing, n°70, Avril-Juin, pp. 107-117.

(2)   Pour aller plus loin sur ces auteurs :

Dominique Cardon (2008), Le design de la visibilité. Un essai de cartographie du Web 2.0, Réseaux, 152/6, 93-137.

Alexandre Kaplan et Michael Haenlein (2011), Editorial – Les médias sociaux sont définitivement devenus une réalité, Recherche et Applications en Marketing, 26, 3, 3-5.

A propos mariamercantiguerin

Contributrice du blog de l'AFM de mai 2012 à mai 2014. Maître de conférences au Conservatoire National des Arts et Métiers, enseignant-chercheur en marketing. Travaille sur la créativité publicitaire, les réseaux sociaux et toutes les nouvelles formes de communication qui rapprochent les consommateurs et les marques. Ses recherches et ses cours en marketing digital sont disponibles sur : http://www.mariamercantiguerin.com/
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Un commentaire pour Classifier les médias sociaux : une étape indispensable pour mieux les utiliser

  1. Je viens de faire un petit article sur l’image chronophage qui pourrait vous intéresser…http://jeanpaulgalibert.wordpress.com/2014/01/14/limage-chronophage/

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